Dans une civilisation de l'image où l'explosion des moyens technologiques de production et de communication bouleversent chaque jour un peu plus nos habitudes culturelles, et créent un véritable phénomène de boulimie, la photographie fait figure de résistante.

Elle résiste, en effet à tout système réducteur, à toute catégorisation, comme la vie même qu'elle capte.

Mais elle résiste aussi à toute spéculation commerciale (c'est en ce sens qu'on peut la dire "pauvre").

Contrairement à une idée reçue, la photographie n'est pas un art populaire. Sa banalisation fait écran à sa compréhension en tant que phénomène artistique.

Pourtant, aucun phénomène culturel n'a eu autant d'importance depuis l'invention de l'imprimerie et toute l'histoire de l'art moderne reste à écrire, car aucune de celles qui existent ne restitue à la photographie le rôle capital qu'elle a joué.

L'ambiguité ontologique de la photographie due au rapport intime qu'elle entretient avec le réel (Barthes parle de lien ombilical) et la reconnaissance dans l'histoire de la photographie d'oeuvres significatives nous obligent

d'une part à distinguer la photographie de toute autre forme de représentation,

d'autre part à distinguer la photographie d'auteur ou créative de la photographie d'illustration.

Nous avons donc choisi d'aller à ce qui nous paraît "essentiel" : une réflexion en alternance sur la nature de la photographie et sa "mise en oeuvre" dans l'acte photographique et dans son encore jeune histoire.